A gauche le boîtier Tomiyama original, à droite la version modifiée
Modification du boîtier Tomiyama Art Panorama 170
Si le boîtier Tomiyama Art Panorama 170 ( décrit dans cet article ) est un appareil qui fonctionne de façon correcte dans sa version originale, le système de mise au point est assez lourd et assez grossier: si à l'infini la mise au point ne pose pas de problème, pour les distances plus courtes le gros bouton situé en face avant n'est pas vraiment fiable, il y a un peu de jeu dans l'ensemble, ce qui n'est pas très bon pour le parallélisme objectif / plan du film et l'echelle de mise au point semble totalement imprécise. De plus l'optique Nikon 90mm qui ouvre à f/4.5 est assez lourde et plutot encombrante.
Une mise à jour du boîtier s'impose donc et il m'a donc semblé judicieux de construire un système de mise au point plus classique par rampe helicoïdale montée sur un cône porte-objectif. Ce type de système a l'avantage d'être beaucoup plus précis, fiable et léger. Une optique plus compacte et légère a été sélectionnée: le Schneider Super Angulon 90mm f/8: l'ouverture plus modérée n'est pas un problème puisque la visée ne se fait pas sur un dépoli mais sur un viseur externe, le cercle image de cet objectif est suffisamment large pour couvrir le format 6x17 avec une petite marge.
les travaux réalisés
la version Tomiyama 170 " CMP " de 2018
La premiere chose a faire a été de démonter entièrement le boîtier pour voir qu'est ce qu'il était possible de faire ... Après démontage, il est bien visible ci-dessous que la partie " mise au point " est tout à fait remplaçable par un autre système ... reste à fabriquer les différentes pièces nécessaires à ce montage: un cône porte objectif, un habillage en fibres de carbone pour le boîtier et trouver une rampe de mise au point hélicoïdale adaptée au Super Angulon 90mm.
le démontage du boîtier original
Le coeur du boîtier ( sur la gauche de la photo ci-dessus ) est fabriqué en résine injectée rigide, ce type de matériau est assez facile a travailler et vieilli très bien. le boitier est très simple: le mécanisme de défilement du film, une fenêtre au format 6x17, et c'est tout !
la partie centrale du boîtier, notez la taille imposante de la fenêtre ! 6x17cm !
L'habillage du boîtier a été réalisé en fibres de carbone. La solution la plus simple pour réaliser un moulage qui épouse parfaitement la forme du boîtier a été d'utiliser directement le boîtier Tomiyama comme moule : préalablement, le boitier a été enveloppé de film étirable en polyéthylène, du film étirable de cuisine en fait ( film PE - ce type de plastique n'adhère pas aux résines époxy ) et le tissu de fibres de carbone imprégné de résine a été pressé directement sur l'ensemble. Cette méthode est assez peu orthodoxe mais permet d'éviter la fastidieuse opération de fabriquer un moule. Après durcissement de la résine, la coque en en carbone épouse parfaitement les formes du boitier tout en étant démontable. Nous pouvons voir sur les photos ci-dessous la coque en carbone juste avant le démoulage ( photo du haut - le boitier original est sous le carbone et est utilisé comme moule ) et la pièce finie après découpe ( photo du bas ).
l'habillage en carbone a été réalisé par moulage direct sur le boîtier puis découpé soigneusement
Une fois l'habillage carbone fini, il a fallu fabriquer le cône porte objectif. Ayant deja testé la méthode de fabrication par empilage de couches de PVC expansé, j'ai utilisé cette méthode efficace et peu onéreuse: du PVC expansé de 2 millimètres d'épaisseur est prédécoupé grossièrement à la forme voulue, les différentes couches sont collées ensemble avec de la colle PVC sur une tige de centrage pour que l'assemblage des différentes couches reste bien dans l'axe. Le nombre de pièces nécessaires dépend de l'épaisseur voulue, dans notre cas une trentaine de couches ont été nécessaires.
la fabrication du cône porte objectif
réalisée par empilement de couches de PVC expansé, cette opération est simple mais nécessite de la patience !
notez la tige de centrage verticale pour concerver un bon alignement entre les différentes couches.
une bande de PVC est laissée au centre des découpes pour l'alignement sur la tige de centrage, cette
bande est provisoire et sera découpée avant la finition du cône.
L'ébauche de la forme du cône est définie, mais je vous rassure, nous sommes d'accord ... à ce stade de la fabrication il ne ressemble à rien ... reste a faire les finitions: l'application d'un enduit armé de fibres ( utilisé en carrosserie automobile - couleur verte sur la première photo ci-dessous ) permet de solidifier l'ensemble et de combler les aspérités entre les différentes couches. A ce stade la toile émeri est de rigueur : ponçage, application d'une nouvelle couche d'enduit, reponçage, nouvelle couche d'enduit ... reponçage ... et ce jusqu'à ce que l'aspect soit parfait ... Les dernières couches d'enduit sont faites avec un enduit de finition, beaucoup plus fin et lisse que l'enduit armé utilisé au départ pour renforcer la pièce. Toutes ces étapes ont pris plusieurs jours mais sont nécessaires pour un fini parfait.
L'étape suivante est la peinture: passage d'un apprêt d'accroche de couleur grise ( photo ci-dessous ), prévoir de passer au minimum 4 ou 5 couches d'apprêt avec ponçage à la toile émeri 1000 , puis 2000 entre chaque couche et comblage des petits défauts de surface avec de l'enduit de finition.
la finition du cône porte objectif
enduit armé de fibres
apprêt d'accroche
base noire
peinture en bombe " vert anglais à paillettes "
vernis ultra brillant bi-composant
La peinture et le verni ont été faits à la bombe, la peinture est un vert anglais à paillettes du plus bel effet s'il vous plait :-) Les paillettes sont projetées sur une couleur de base, du noir dans notre cas. Un appareil photo est généralement noir, j'ai voulu changer un peu ... ça reste raisonnable dans la réalité, les paillettes restant assez discrètes ( plus que sur les photos de cet article ). La face supérieure du boîtier a subi le même traitement, en prime les 2 pièces ont été vernies avec un verni bi-composant ultra brillant.
une fois les différentes parties assemblées, la rampe de mise au point de fabrication chinoise est montée
une grosse bulle de niveau précise a été ajoutée sur la droite du viseur
Le cone fini a été fixé sur la façade en carbone ( vis internes + mastic colle Sikaflex 11FC noir ) qui a elle même été fixée sur le boîtier principale par 4 vis accessibles depuis la façade, une couche de Sikaflex 11FC noir permet une bonne étanchéité à la lumière entre la façade et le boitier principal.
Le montage final de l'optique Schneider Super Angulon 90mm f/8,
notez l'échelle de mise au point inscrite manuellement sur la bague de mise au point,
la précision de cette échelle est cruciale puisque la mise au point ne se fait pas sur un dépoli mais au juger,
les distances de mise au point de 15, 11 et 9 mètres correspondent respectivement
aux distances hyperfocales pour les diaphragmes f/11, f/16 et f/22 pour le 90mm
L'intérieur de la chambre a été garni de mastic colle Sikaflex 11FC noir pour une bonne étanchéité
à la lumière, puis tapissé de révêtement noir non réfléchissant spécifique à l'industrie optique.
La semelle inférieure réalisée en fibres de carbone permet de rigidifier la liaison du trépied au boîtier.
La platine rapide est de type ARCA, elle est fixée à demeure sur la semelle ( vis + colle epoxy )
Le dos est simplifié pour plus de légèreté: si la partie presse film et verrouillage du dos ont été conservés,
tout a été poncé, poli, repeint et un cache en carbone a été ajouté.
Un volet en aluminium masque la fenêtre compte vue afin d'éviter de voiler le film.
Si le viseur d'origine a une très bonne qualité optique, son revêtement était très usé et le masque servant à délimiter l'angle de champs n'était pas des plus précis. J'ai donc conservé le viseur d'origine, mais après demontage complet des lentilles, le corps du viseur en aluminium a été poli façon miroir sur sa partie arrière et peint en noir sur sa partie avant. Le polissage " miroir" demande pas mal de travail: commencer en ponçant avec un grain grossier ( 180 ), puis passer au grain de 280, puis 500, puis 800, puis 1000 et enfin 2000 pour un aspect parfaitement lisse, terminer ensuite avec un liquide de polissage type " Belgom Alu " qui permet de faire briller et d'avoir un effet miroir . A raconter, c'est facile ... à faire c'est différent ... j'ai passé autour de 6 ou 7 heures sur ce viseur :-)
les premières prises de vues
en cours de prise de vue
notez le tableau d'exposition au dos du boîtier
photo " iPhone"
l'image finale: film Ilford FP4+ iso 125, filtre gris neutre ND9, f/22, pose 8 minutes
Les premières prises de vues réalisées avec ce nouveau boitier sont plutôt bonnes, pas de fuite de lumière en vue ni de gros défaut. L'alignement de l'optique sur l'axe est bon et la définition est la même sur les bords droit et gauche, signe que le plan du film et l'axe optique sont bien perpendiculaires. C'est à mon sens la première chose à vérifier sur une contruction personnelle, surtout sur un format aussi large: la moindre erreur d'orientation de l'optique par rapport au plan du film engendrerait des bords d'image flous alors que le centre est bien net !
Sur cette image j'ai volontairement accentué le vignetage pour son effet dramatique, mais utilisé à f/16 ou f/22 il n'est pas trop prononcé. Le choix du Super Angulon 90 mm f/8 est plutôt bon: compacité et légèreté, avec une qualité optique très bonne sur une grande partie de l'image, seuls les angles et les bords extrêmes perdent un peu en définition, mais rien de dramatique.
En conclusion, ce boîtier Tomiyama Art Panorama 170 modifié est plus agréable à utiliser que la version originale, la mire au point est plus précise et plus facile à régler, l'ensemble boitier + système optique est beaucoup plus rigide, gage de fiabilité et de précision dans le point. Le poids complet du boîtier modifié est de 2100 grammes ( contre 3kg pour la version originale ), il y a donc un gain de poids certainement appréciable sur le terrain ( utilisation de fibre de carbone, cône en PVC expansé, optique ouvrant à f/8 ). Est-ce-que ces progrès justifient la somme de travail investie ? Je pense que oui: 1 kg a été gagné sur le poids total du matériel, la mise au point est maintenant beaucoup plus fiable et prédictible, ce qui est quand même la base pour un appareil moyen format qui vise une qualité d'image irréprochable, et le look de char russe des années 80 du boitier original fait place à un look résolument plus moderne !
A PROPOS DE LA PRISE DE VUE PRISE EN EXEMPLE
J'utilise systématiquement des filtres gris neutres pour mes prises de vues marines ( ND 9, 6 ou 3 en fonction de la météo ), la mesure de lumière est faite avec un petit compact numérique et un tableau me permet de connaitre le temps de pose résultant en fonction du diaphragme choisi, du filtre gris neutre et de l'ecart à la réciprocité du film utilisé, par exemple pour le film Ilford FP4+, le tableau est le suivant :
FILM : ILFORD FP4+ 125 iso | |||||||||
numérique 400 f/5,6 | ND 9 / temps compensé | ND 6 / temps compensé | ND 3 / temps compensé | ||||||
f/11 | f/16 | f/22 | f/11 | f/16 | f/22 | f/11 | f/16 | f/22 | |
1/2000 s | 9 s | 25 s | 50 s | 1/2 s | 2 s | 4 s | 1/15 s | 1/8 s | 1/4 s |
1/1000 s | 25 s | 50 s | 2 m 30 s | 2 s | 4 s | 9 s | 1/8 s | 1/4 s | 1/2 s |
1/500 s | 50 s | 2 m 30 s | 8 m | 4 s | 9 s | 25 s | 1/4 s | 1/2 s | 2 s |
1/250 s | 2 m 30 s | 8 m | 30 m | 9 s | 25 s | 50 s | 1/2 s | 2 s | 4 s |
1/125 s | 8 m | 30 m | 1h 30 m | 25 s | 50 s | 2m 30 s | 2 s | 4 s | 9 s |
1/60 s | 30 m | 1h 30 m | 50 s | 2 m 30 s | 8 m | 4 s | 9 s | 25 s | |
1/30 s | 1h 30 m | 2 m 30 s | 8 m | 30 m | 9 s | 25 s | 50 s | ||
1/15 s | 8 m | 30 m | 1 h 30 m | 25 s | 50 s | 2 m 30 s | |||
1/8 s | 30 m | 1 h 30 m | 50 s | 2 m 30 s | 8 m | ||||
1/4 s | 1 h 30 m | 2 m 30 s | 8 m | 30 m | |||||
1/2 s | 8 m | 30 m | 1h30 | ||||||
1 s | 30m | 1h30 |
tableau de temps d'exposition en fonction du filtre ND et de l'écart à la réciprocité
La mesure de lumière se fait toujours avec le même compact numérique et toujours avec les mêmes réglages de sensibilité ISO 400 et de diphragme à f/5.6. La mesure de lumière donne donc un temps de pose qui est la variable de ce tableau ( colonne de gauche sur le tableau ), les autres colonnes donnent le temps de pose résultant sur le film utilisé en fonction:
- du filtre ND utilisé ( 9, 6 ou 3 )
- du diaphragme choisi ( colonnes f/11, f/16 et f/22 )
Les temps de pose indiqués dans le tableau tiennent compte de l'écart à la réciprocité du film, il est assez important de préparer ce type de tableau et de l'imprimer pour qu'il soit disponible facilement pendant les prises de vues car on peut largement se tromper en calculant mentalement ce genre de choses! Personnellement, je colle ce tableau au dos du boîtier, il est ainsi toujours visible.
Prenons un exemple ( les chiffres marqués en rouge sur le tableau ): si la mesure numérique donne un temps de pose de 1/500ème pour f/5.6 iso 400 ( sur le boitier numerique qui sert à la mesure ) et que l'on utilise un filtre ND9 à f/22 avec le film FP4+, le temps de pose résultant sera de 8 minutes. Si on avait utilisé un filtre ND 6, le temps de pose aurait été de 25 secondes et 2 secondes avec un filtre ND 3. Simple et efficace, ce type de tableau permet de simplier les calculs sur le terrain, de choisir le bon flitre ND en fonction des conditions lumineuses et du temps de pose désiré.
Tomiyama modifié, Super Angulon 90mm f/8
film Ilford FP4+ iso 125, filtre gris neutre ND9, f/22, pose 9 minutes
Tomiyama modifié, Super Angulon 90mm f/8
film Ilford FP4+ iso 125, filtre gris neutre ND6, f/22, pose 2 minutes
Tomiyama modifié, Super Angulon 90mm f/8
film Ilford FP4+ iso 125, filtre gris neutre ND6, f/22, pose 2 minutes
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